Toponymie de Trégunc

Les Amis du patrimoine de Trégunc ont à cœur de faire connaître les richesses du patrimoine et de l’histoire de la commune, contribuant ainsi à la préservation de ce bien commun. 

La démarche mise en œuvre dans ce projet autour de la toponymie locale permet d’inventorier, d’étudier, de comprendre et de partager des données précieuses en les publiant sur le blog des Amis du patrimoine.

Cette action vise non seulement à favoriser la compréhension de notre patrimoine, mais également à susciter l’envie de le protéger pour les générations futures.

La documentation s’avère parfois foisonnante, mais elle peut également faire défaut. La recherche sur l’interprétation des toponymes n’est pas toujours une tâche aisée : les hypothèses peuvent diverger, le doute persister, les égarements induire des confusions et certaines investigations se révéler infructueuses. En conséquence, les démarches suivies se doivent d’éviter toutes interprétations hâtives, l’évidence dissimule parfois des mystères qu’il faut oser creuser.

Au fil du temps, les habitants de Trégunc ont imaginé et adopté des noms de lieux en breton (toponymes) en lien avec leur environnement, leur travail, leur habitat…

Les toponymes, patrimoine immatériel à préserver, tissent un lien fort entre les habitants et leur territoire. Ils offrent également une porte d’entrée pour aborder la langue bretonne et enrichir l’identité culturelle et linguistique de la commune.

Ces noms de lieux constituent des outils pratiques pour l’élaboration de la cartographie locale. Ils incitent les habitants à redécouvrir leur environnement et à s’approprier leur patrimoine à l’heure où les noms de rue, même s’ils utilisent parfois une dénomination bretonne, ne mentionnent plus certains noms de fermes et de villages à la suite de la mise en œuvre de la Loi 3DS du 21 février 2022 (différenciation, décentralisation, déconcentration). Cette loi, portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale, impose aux maires de donner un nom et un numéro à toutes les voies et de les enregistrer dans un base Adresse locale avant de les transmettre à la Base Adresse nationale (BAN) : voir la page, la carte et une analyse sur la dénomination des voies à Trégunc (janvier 2025).

Certes, ces dispositions permettent d’alimenter les bases GPS et ainsi d’améliorer l’intervention des services tels que les pompiers, la poste, les télécommunications… (voir la carte de Concarneau Cornouaille Agglomération – CCA).

Est-ce en préservant notre toponymie bretonne millénaire ? De nombreuses dénomination bretonne de lieux-dits n’ont plus d’adressage et pourrait insidieusement tomber en désuétude et disparaître.

Par ailleurs, le site Kerofis de l’Office public de la langue bretonne produit une carte portant des toponymes en breton, avec quelques manques ; on peut également relever quelques erreurs de localisation (Pont Mélan, Kerous, Feunteun an Aodoù…). Cependant, sur cette carte, la “Route de Pendruc” devient “Hent Pendruk”.

Voir aussi sur le site Bureaudeposte.net, comment bien rédiger son adresse postale en utilisant, le cas échéant, à la fois la dénomination de la voie et celle du lieu-dit.

La microtoponymie est l’étude des noms de lieux à petite échelle : champs, chemins, rivières, collines, forêts ou parcelles spécifiques. Ces microtoponymes locaux, souvent méconnus, regorgent pourtant d’indices et d’informations précieuses laissés par les sociétés passées.

À Trégunc, par exemple, l’ancien cadastre établi entre 1845 et 1846 (plans et matrices) recense non seulement la situation des parcelles, mais aussi leurs noms, révélant ainsi une riche cartographie historique.

La microtoponymie joue un rôle essentiel dans la préservation de la mémoire des pratiques agricoles, artisanales et culturelles d’autrefois. Ainsi, un lieu nommé “Dourveil” évoque très probablement l’existence passée d’un moulin ; “Park ar Chapel” indique l’emplacement ancien d’une chapelle, illustrant à la fois les croyances et l’organisation spirituelle d’une époque. Ces noms de lieux conservent également des traces de langues disparues, témoins des influences linguistiques au fil des siècles.

Les microtoponymes sont des archives naturelles du paysage. Ils révèlent des caractéristiques géologiques, géographiques ou écologiques souvent transformées ou disparues : un étang, un coteau, une prairie, un bois ou encore une lande. Dans le domaine maritime, les marins ont attribué un nom à chaque roche, pointe ou anse, permettant de se repérer et de transmettre des connaissances essentielles pour la navigation.

Quelques articles abordant la microtoponymie locale et ci-dessous quelques réalisation à partir des données du cadastre de 1845.

Selon Arthur Le Beux, “la particularité du breton de Trégunc est de mettre un d là où ordinairement on met un z à la fin d’un mot.
Exemples
Avalou poazet, avalou poaz se dit avalou poudet, noulou poad (pomme cuite)
Tad Koz, mamm goz se dit tad kod, mamm god (grand-père, grand-mère)
Le t remplace le z final dans les noms, les adjectifs, les verbes et les adverbes
Kaz (chat) devient kat.”

“L’article ne se prononce pas, on fait légèrement sentir la consonne et si le mot suivant commence par une voyelle, la consonne de l’article deviendra la première lettre.
Avel (vent), ael, an avel devient nael
Aval, (pomme), aol, an aval devient n’aol.”

An : article défini unique jusqu’au XVIIe siècle qui verra apparaître un article ar. L’article al est plus récent. L’article an est souvent conservé dans les graphies de nom de lieux, il se réduit parfois à a (devant une consonne) ou n  (devant une voyelle) et se transforme en am , ar ou disparaît… (d’après A. Deshayes).

Kerlaëren (1841)

Ker : Le préfixe Ker (kêr) que l’on rencontre parfois sous la forme Ꝃ (K barré) figure dans de nombreux toponymes. Il signifie “lieu habité” et par extension, “village” voire “ville”. Utilisé à partir du XIe siècle, il succède au préfixe Tré (d’après Albert Dehaye). Kêr signifie “habitat fortifié” avant le Xe siècle, domaine rural à partir du  XIe siècle (Y B Kemener).
Kaër ou Caër désigne d’anciennes villes fortifiées ou des châteaux forts (F Gourvil).

Tre : Le préfixe tre, utilisé jusqu’au Xe siècle, se rapporte à une trève, division de paroisse, un lieu habité et cultivé, et plus tard à un quartier, sans signification religieuse particulière (d’après Y B Kemener).
Tre (vieux breton) peut aussi signifier “à travers, au-delà, par”

Lann : ce terme signifie “lande”, souvent orthographié lan ou land, parfois lam, len ou lin (A Deshayes). Lann (parfois Lam) peut également se rapporté à un lieu consacré (ermitage, enclos…).

Croissant : malheureuse traduction de Kroashent qui signifie “carrefour”, de Kroas (croix, croisement) et hent (route, chemin).

Un anthropotoponyme est un toponyme portant le nom d’une personne.

  • Dictionnaire des noms de lieux bretons, Albert Deshayes, Le Chasse-Marée, 1999
  • Dictionnaire topographique du Finistère, Albert Deshayes, Coop Breizh, 2003
  • Les noms de lieux bretons, Bernard Tanguy, Emgleobreiz.com, 2015
  • La toponymie Celtique, Jean-Marie Plonéis, Éditions deu Felin, 1989
  • Guide des noms de lieux breton,  un trésor à préserver, un patrimoine à partager, Yann-Bêr Kemener, Skol Vreizh, 2022
  • Dictionnaire des noms de communes, trèves et paroisses du Finistère, Bernard Tanguy, Chasse-Marée, 1990
  • Étude des noms de lieux à l’école élémentaire, André Cornec, CRDP de Bretagne, 1993
  • La toponymie celtique, l’origine des noms de lieux en Bretagne, Jean-Marie Plonéis, Éditions du Félin, 1989
  • Dictionnaire breton-français, Roparz Hemon, Al Liamm, (nombreuses éditions)
  • Toponymie nautique de la côte sud du Finistère, Alain Le Berre, imprimerie nationale, 1960
  • Bulletins municipaux de Trégunc des années 1990
  • Noms de famille, prénoms, surnoms et noms de lieu à Trégunc et Névez au 13e siècle, article de Francis Gourvil, Société archéologique du Finistère 1978
  • Les notes d’Arthur Le Beux (Archives diocésaines Quimper)
  • Les travaux de recherche de Maurice Ollivier (non publiés)
  • Les travaux de recherche de Christian Gérard (non-publiés)
image_printVersion imprimable
Partager cet article :