Appelé du contingent en mai 1968

En 1967, après des études à Creil, dans l’Oise, je retrouve mes terres à Croas-Voaler en Trégunc. En septembre de cette année-là, je suis incorporé aux troupes de marine de Vannes afin d’effectuer mon service militaire.


Seize mois à crapahuter sur les terrains de manœuvres de Bretagne, de Normandie et du centre de la France, sont nécessaires pour apprendre à faire la guerre.

Mai 1968 de Vannes à la Courtine

En mai 1968, nous sommes en manœuvre à La Courtine dans la Creuse. À l’époque, le petit transistor à piles est autorisé en dehors des heures de services, aussi étions-nous informés des évènements de mai se déroulant principalement à Paris : barricades, jets de pavés, le début des grèves, etc. Les gradés commencent à se méfier de nous, surtout des sursitaires, silence radio dans les rangs, et très peu d’échanges avec nos supérieurs.

Maurice Tanguy à La Courtine en 1968
Mai 1968 à La Courtine

Le mercredi 29 mai, le président De Gaulle reporte le conseil des ministres à jeudi et quitte Paris à 10 h 30 pour Colombey-les-deux-Églises mais, à 14 heures, il n’est toujours pas arrivé. Au même moment, notre état-major modifie le programme de manœuvre sur le terrain, il nous prépare quelque chose, cela devient même angoissant.
Brutalement les ordres tombent : nous sommes consignés dans nos chambres : lits défaits, draps et couverture pliés, pas question de se déshabiller pour dormir, ni de quitter ses rangers, les pleins des véhicules sont effectués, le paquetage est au pied du lit, les rations de survie distribuées, l’ambiance est lourde, comme le casque du même nom, l’inquiétude est là. Quelques indiscrétions nous informent qu’un emplacement est réservé dans la région parisienne pour intervenir afin de débloquer la capitale des barricades. Une nuit passe, puis le président de Gaulle, après avoir consulté la veille le général Massu, réapparaît au conseil des ministres, les tensions se libèrent au gouvernement et sur le terrain, la décision de notre état-major est prise : nous n’irons pas à Paris.

Juin 1968 de Vannes à Trégunc

Par contre, la mission dans la Creuse est terminée, nous rentrons à notre caserne de Vannes. Les préparatifs d’un départ étant déjà effectués, le convoi militaire s’ébranle : Jeep du chef du régiment en tête, suivie des automitrailleuses (AML), des camions de transport de troupes Marmon-Unic de 1960 et des GMC de maintenance du surplus de stock US de 1945, puis de la Jeep de fin de convoi.
Le 30 mai lorsque nous traversons les villages et quelques grandes villes pour rejoindre Vannes, la population est massée sur le bord de la route et nous applaudit comme si nous avions libéré la France. C’est un accueil émouvant qui nous est réservé, la France respire, il n’y aura pas de guerre civile, les généraux de Gaulle et Massu en ont décidé à Baden-Baden en Allemagne.

Notre arrivée à Vannes est triomphale, et nous sommes soulagés de ne pas avoir eu à nous confronter aux étudiants à Paris. Début juin, la France est encore bancale, l’essence manque, nos permissions sont reportées à mi-juin. Enfin, quelques autorisations de sortie sont délivrées et je rejoins Trégunc que je retrouve paisible, comme si rien ne s’était passé…
En consultant le journal local, après un mois d’absence, je constate que la commune n’a pas été directement ébranlée par ce mouvement social.

Mai 1968 À Trégunc

Mercredi 29 mai : Le général de Gaulle, président de la République, part pour Colombey à 10 h 30,  il fait un détour pour voir le général Massu à Baden-Baden.

Vendredi 31 mai : De Gaulle dissout la chambre des députés et de nouvelles élections auront lieu les 23 et 30 juin. Une manifestation monstre en faveur du général de Gaulle se déroule de la Concorde à l’Étoile.

Mercredi 5 juin : Une forêt de bateaux à quai dans le port de Concarneau : du jamais vu depuis les années 1930. Le comité de soutien de Trégunc récolte 1 829 F pour les enfants de grévistes, dont 300 F à la quête de l’église. 315 repas gratuits ont été servis à la cantine scolaire par la municipalité.

Vendredi 7 juin : Les cours reprennent timidement dans les écoles primaires.

Jeudi 13 juin : Les marins-pêcheurs de Concarneau votent la poursuite de la grève par 703 voix sur 724 votants

Samedi 15 juin : Les élèves du lycée Pierre-Guéguin sont toujours en grève et le principal, monsieur Couchouron, exhorte les élèves à cesser le mouvement.

Dimanche 16 juin : La cérémonie de confirmation présidée par Monseigneur Favé, évêque de Quimper, est prévue le dimanche 16 juin à 10h au bourg et à 15h à Saint-Philibert.

Le repas de Trégunc-sport aura lieu le samedi 22 juin au restaurant Le Dars route de Saint-Philibert.
La kermesse de l’Amicale laïque prévue le dimanche 23  juin est annulée suite aux évènements.

Flottille de pêche à Concarneau dans les années 1960
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