L'école Saint-Marc dans les années 1930

École chrétienne de garçons Saint-Marc en construction

A Trégunc, il n’y a pas d’école catholique de garçons. Il faudra attendre 1931 pour que le recteur Grall et les vicaires Rouallec et Bellec ouvrent l’école Saint-Marc, en référence au saint patron de la paroisse, route de Kerfeunteun, grande bâtisse avec un internat et un beau jardin pour les travaux pratiques des futurs paysans.

On dit Saint-Mar sans prononcer le C, je n’ai jamais su pourquoi, car en
breton on dit bien Mark, dans Pardon Mark qui a lieu le dernier dimanche
d’avril.
Les frères maristes, exilés en Grèce depuis la loi de 1905, sont venus en soutane. Ils devront se mettre en civil pour avoir le droit d’enseigner, en vertu de la même loi ; ce sont maintenant des Messieurs.
J’arrive en septembre 1936 à l’école Saint-Marc après quatre ans chez les sœurs, sachant parfaitement lire, écrire et compter.

École Saint-Marc à Trégunc
Le certificat d’études

Au certificat d’études primaires de juin 1940, en pleine guerre, avant l’âge minimum requis de onze ans, bénéficiaire comme ma cousine Anne Duigou et Yvan Dervout d’une dérogation spéciale d’Albert Lebrun, président de la République pour peu de temps, nous avons été reçus tous les trois ; souvenir marquant de gosses, perdus parmi des grands.
Le certif, qu’on passait dans les locaux de l’école laïque à cinquante mètres de la maison, c’était quelque chose. Il y avait des problèmes de trains qui se croisent, de robinets qui coulent, une dictée, une rédaction… on devait dessiner une feuille de blé ou de carotte, chanter Le Chant du Départ ou La Marseillaise. Je doute que l’on demande de nos jours de telles compétences aux enfants de cet âge.
Au lieu de me laisser partir en sixième après le certif en septembre 1940, les Frères ont voulu me garder encore un an et j’ai intégré le cours supérieur. J’ai quitté l’école fin juin 1941. Je suis entré au collège en sautant la sixième, grosse erreur, l’enseignement primaire étant vraiment différent du secondaire, avec l’initiation au latin, aux rédactions, etc. Du coup, mais avec ce handicap, je serai le plus jeune de ma classe de cinquième.
A Saint-Marc, il n’y a donc pas de frères, seulement des Messieurs en costume ou blouse : monsieur Romain le directeur, monsieur Receveur au cours élémentaire, le bon monsieur Raynaud au cours moyen, monsieur Ronzon au cours supérieur, celui d’après le certif, surnommé Koffic (bedonnant) par les élèves et le terrible surveillant barbu monsieur Fraysse barbich gaor, barbiche de chèvre, adepte convaincu du châtiment corporel, en l’espèce des coups de règle sur les fesses, et unanimement détesté. Il y a aussi monsieur Georges l’économe, un peu le factotum de l’école, très estimé de tous. Je n’ai pas connu monsieur Joseph, mort au début de l’année 1936, il est enterré à Trégunc.

Le frère Paul
Frère Paul, directeur de l’école Saint-Marc, décédé subitement le 10 août 1964

A la rentrée de septembre 1941, on verra arriver de nouveaux frères, dont le Hongrois frère Paul. Les anciens Messieurs autorisés par Pétain devenu chef de l’État français vont reprendre la soutane et deviendront à nouveau des frères maristes. L’instruction y était sévère mais excellente, et d’autant plus méritoire que beaucoup des élèves venant de la campagne n’avaient que peu de notions de français. Ils auront vite fait de l’apprendre, le breton était interdit entre élèves. Monsieur Fraysse y veillait, et il valait mieux éviter d’avoir affaire à sa sévérité. Les gars du bourg comprenant le breton, ne serait-ce que pour pouvoir parler aux vieilles personnes, avaient un certain sentiment de supériorité qui sera vite balayé lorsque les petits paysans et les rares marins auront surmonté leur handicap. La cible principale de l’école était le milieu paysan. Comme tous les élèves, paysans ou pas, au cours supérieur, j’ai appris à semer, planter, greffer, bouturer et arpenter.
Dès l’arrivée des troupes d’occupation, la vie de l’école est perturbée ; une partie des locaux étant réquisitionnée pendant la cohabitation avec les soldats allemands, nous n’avons eu que de petits problèmes comme le vol d’une chambre à air d’auto destinée à équiper nos lance-pierres pour remplacer le caoutchouc carré introuvable.

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