Marins de Trégunc péris en mer

L’expression péri en mer, utilisée dans le milieu maritime, évoque une noyade, une disparition. À moins d’un témoin, le tragique accident de mer n’était connu de la famille que lorsque le bateau à voiles n’arrivait pas au port d’attache après trois semaines de pêche. À chaque coup de vent important, l’inquiétude des femmes de devenir veuve très jeunes était grande. Les enfants de marins, orphelins, répondaient à chaque questionnement de leurs copains : où est ton père ? Il est en mer, répondaient-ils sans préciser s’il était dessus ou en dessous de la mer. À Trégunc, au siècle dernier, de nombreux marins ont péri en mer dans diverses circonstances, mais très souvent lors de tempête.
Depuis les années 1950, les bateaux ont remisé leurs voiles pour une motorisation suffisante pour vaincre les vagues. Une nouvelle conception des carènes a permis une meilleure stabilité, particulièrement en cas de mauvais temps. La sécurité à bord des bateaux de pêche a été nettement améliorée au niveau du poste de travail, notamment par la réalisation de ponts couverts, protégeant ainsi les marins des paquets de mer lors de leur travail sur le pont. Une prévision météo plus certaine et un matériel de communication radio plus performant améliorent l’information. Radio-Conquet, depuis 1950 jusqu’en 2000, informait brièvement, mais avec soulagement, les familles de la présence du bateau lors des incontournables vacations de midi et de la soirée.
De nos jours, les accidents de mer se réduisent peu à peu, grâce à une meilleure prévention. Les veuves ne sont plus habillées de noir, la coiffe de deuil et celle de demi-deuil ont disparu, les enfants orphelins n’ont plus de brassard noir au bras.

Les deux guerres mondiales
La Première Guerre mondiale a été tragique pour de nombreux marins de Trégunc.
Plus de 80 inscrits maritimes de la commune ont succombé. 51 d’entre eux prêtés à l’Armée de Terre seront tués au front et 29 autres marins mobilisés périront sur les bateaux.
Au recensement de 1911, la population de Trégunc est de 4945 personnes : 2501 femmes et 2444 hommes dont 571 marins, soit 22 % de la population active masculine. Les 2302 enfants représentent 47 % de la population.
Durant le conflit 1939-45, 18 marins de Trégunc ont péri lors des combats en mer. Lors du torpillage de la Marine française à Mers-el-Kébir, 1300 marins sont morts ou disparus dont trois de Trégunc : Pierre Montfort, Jean Morvan et Joseph Flatrès (articles du Ma Bro de juin 2013). Quand le paquebot Meknès a été torpillé au large de Plymouth en juillet 1940, 420 marins sont morts ou ont disparu, dont deux de Trégunc, Louis Quentel et Yves Guinvarc’h (Articles du Ma Bro de décembre 2013).
La tempête de 1930
Fin septembre, le thon quitte nos côtes, les thoniers désarment, c’est donc la dernière marée de la pêche au thon pour les dundees.
À la marée d’équinoxe des 19 et 20 septembre 1930, un ouragan se déchaîne sur les côtes bretonnes, 27 thoniers sombrent, 207 marins disparaissent laissant 127 veuves et 184 orphelins.
Le quartier maritime de Concarneau perd 46 marins. Trois dundees rentrent au port avec chacun un marin de Trégunc disparu :
– Grésillon : Joseph Furic, 28 ans, matelot, né à Névez et habitant à Trégunc
– Gas de Trégunc : François Bourhis, 27 ans, matelot
– Yvonnic : Corentin Glémarec, 26 ans, matelot
Huit autres dundees rentrent avec le pavillon en berne, signifiant un décès à bord ou un disparu : Marguerite, Aide-toi, Yvonnic, Rose des vents, Sable d’or, Lucie-Marie, Philanthrope, Touareg.
Certains dundees ne reviendront pas : Tante-Titine, Bocceno, René-Raymond, Pelloc’h-Atao.
(Histoire d’une ville : Concarneau, L.P Le Maître, page 164
Mémoire de Tréguncois, Robert Sellin, page 112).

Victorine Guiffant, femme de marin, en 1933
Victorine se marie en 1932, elle a 21 ans. L’année suivante, elle met au monde sa fille Simone. Le 3 mai 1933, son mari Pierre Cutullic, 23 ans, son père Yves Guiffant, 54 ans, et son frère Ferdinand Guiffant, 23 ans, périssent en mer aux Glénan. Le Souffleur immatriculé CC 1972 a sombré corps et biens. Victorine a relaté sa vie de femme de marin dans l’ouvrage du même nom écrit par Guillaume Moingeon et à la radio, sur France Culture, le 20 octobre 2005. Elle décède en 2010 à 99 ans.
La tempête de 1946
Le dimanche 18 août 1946, c’est la fête des Filets Bleus à Concarneau ; il fait très beau, des touristes assistent par milliers à cette fête, créée en 1905, période à laquelle la sardine a déserté nos côtes.
Le lendemain, lundi 19, les dundees à voiles Savorgnan de Brazza et Vire-au-Vent quittent le port de Concarneau pour une marée de pêche au thon.
Les thoniers René-Joseph et Sainte-Clothilde d’Étel rejoignent également les lieux de pêche. Il n’y a pas de signe annonciateur de tempête en cette fin août 1946.
Et pourtant, elle se manifeste le lendemain, à 400 milles au large de Penmarc’h. L’entourage peut imaginer les circonstances d’un naufrage dramatique : après avoir mis à la cape, réduit la voilure, tenir bon encore une heure, un jour… en espérant une accalmie. Hélas, une déferlante s’abat sur le pont en bois du dundee, des tonnes d’eau, un grand fracas, des craquements déchirants et le bateau s’enfonce dans cette mer hostile. Dans ces situations dramatiques, en une fraction de seconde, le naufragé pense au sourire d’un fils d’un an, au regard d’une fille de dix ans qui se réveille en sursaut et demande : Papa tu es où ? au dernier baiser d’une épouse en quittant le quai, au souvenir d’une étreinte, de la famille, des amis… Sans témoin, brutalement, le bateau devient cercueil dans cette nuit apocalyptique (MT).
Les quatre bateaux avec 31 marins à bord seront considérés perdus corps et biens. Il faudra patienter plus d’un mois, attendre le 26 septembre, pour que les affaires maritimes annoncent la disparition officielle de ces thoniers.
Les équipages des deux dundees de Trégunc ne rentreront plus à Concarneau dont, pour le Savorgnan de Brazza, Yvon Tanguy, 37 ans, Joseph Glémarec, 32 ans, Alexandre Furic 16 ans, tous les trois de Lambell, et Arsène Signour, 26 ans, de Pendruc ; pour le Vire-au-Vent : Jean-Marie Dizet, 32 ans, natif de Trégunc et habitant Croissant-Saint-André.
Après de vaines recherches, deux messieurs viennent frapper à la porte du domicile du marin disparu : le maire de la commune et l’administrateur des affaires maritimes du quartier de Concarneau. Une femme en sanglots, déjà habillée de noir, la tenue des veuves, accompagnée de ses deux enfants en pleurs, agrippés à sa jupe, leur ouvre la porte pour entendre la terrible nouvelle… C’est l’Ankou, ce squelette à la faux qui passe avec son cortège de malheurs (MT).
En effet, l’enquêteur doit, en l’absence de témoins visuels, de traces ou de preuves, interroger tous les ports de la zone de pêche, afin de vérifier que les personnes ne s’y trouvent pas, que le bateau a bien disparu. Ensuite, il faudra attendre encore plus d’un an de procédures administratives pour établir un certificat de non-présentation au domicile et judiciaires, pour obtenir un jugement déclaratif de décès.
En 1945, Julien Ballery, armateur à Concarneau, crée la caisse d’entraide aux familles de péris en mer.

Naufrage du Vro-Goz le 6 août 1948

En ce début d’août 1948, une violente tempête se déclenche en mer, le thonier Vro-Goz, pris dans un déferlement de vagues, fait naufrage avec ses huit hommes d’équipage dont sept de Trégunc : Ernest Furic, 23 ans, de Saint-Philibert, Félix Guillou, 23 ans, Henri Morvan, 37 ans, et Pierre Rioual, 48 ans, de Trévignon, Yvon Tanguy, 38 ans, et Jean-Marie Martin, 46 ans, de Curiou, Louis Loussouarn, 43 ans, de Kerlin.
Les péris en mer du Vro-Goz laissent six veuves et quatorze orphelins (Roger Tanguy : Chapelle de Saint-Philibert, Roger Tanguy, page 23).
La tempête de 1954
Le mercredi 26 novembre 1954, le vent de suroît se déchaîne. En fin d’après-midi, il se renforce à 130 km/h et la mer se forme avec des creux de douze mètres. Sur le port de Trévignon, il y a de l’écume blanche, comme de la neige, alors en pleine mer…
Il est trop tard pour rejoindre le port de Concarneau, il faut mettre le bateau à la cape, c’est-à-dire hisser la petite voile arrière – le tape-cul – et amarrer la barre pour que le bateau navigue de trois-quarts face à la lame.
Tous les soirs, dans sa maison neuve à Curiou, Yvonne Breton, récemment mariée avec René Guillou, écoute la vacation de Radio-Conquet de 17 h 15 afin d’avoir des nouvelles du bateau et de son mari. Désormais, elle n’entendra plus ce message : Allo… Ici le Tourville CC3261, patron Ambroise Signour, nous sommes au nord de la Grande Sole. La mer est belle. Tout va bien. René Guillou de la Pointe embrasse bien sa femme (Paris-Match de décembre 1954).
Cinq bateaux de Concarneau ne rentrent pas au port, 46 marins sont considérés comme perdus. Ils laissent 35 veuves et 63 orphelins de Trégunc, Névez, Moëlan-sur-Mer, Riec-sur-Bélon et Concarneau : le Tourville sombre corps et biens avec ses 10 hommes d’équipage, dont : Ambroise Signour, patron de 23 ans et Arsène Signour, 36 ans, son frère, tous deux de la Pointe de Trévignon, René Guillou, 24 ans (époux d’Yvonne Breton) et son frère Yves Guillou, 22 ans de Curiou, Roger Le Bail, 30 ans, de Trégunc ; Perle d’Arvor, 9 hommes d’équipage dont le mousse Yves Gourlaouen, 17 ans, de Trégunc ; Alain-Yvon, également 9 hommes d’équipage dont Firmin Portal, 34 ans, Bernard Furic, 50 ans, Pierre Sellin, 47 ans et Roger Rannou, 31 ans, de Trégunc ; Berceau de Moïse, 9 hommes d’équipage dont Yves Guirriec, 29 ans, de Trégunc ; Pierre-Nelly, 9 hommes d’équipage dont Yves Le Bris, 26 ans, natif de Trégunc.
Ce 26 novembre encore, le Tendre Berceuse de Douarnenez perd aussi 13 hommes d’équipage.
Autres naufrages marquants
• 1889 : 7 personnes d’une famille de Pendruc et de Pouldohan périssent au large de la Pointe de la Jument en revenant de la pêche au goémon à l’île des Moutons. (Ma Bro de juin 2017).
• 1900 : La chaloupe Sainte-Marie sombre à 10 milles des Glénan suite à un abordage, 7 marins disparus dont 3 natifs de Trégunc : Jean-Marie et Yves Furic et Jean-Marie Nancillon.
• 1912 : le dundee Remember disparaît dans le Golfe de Gascogne avec 5 hommes d’équipage dont Jean-Marie Richard et Yves Jaffrézic de Trégunc.
• 1941 : le dundee Gaby-Mary, lors d’une tempête de novembre, 8 disparus dont 4 de Trégunc : Marc Quentel, Pierre Breton, Jean-Marie Dizet et Henri Nerriec.
• 1942 : le dundee Île Verte, 13 disparus de Névez dont Yvon Ollivier natif de Trégunc.
• 1949 : le thonier Pierre-Marcel, 7 disparus dont Jean-Marie Sellin et Louis Terrec de Trégunc.
• 1951 : en février, le chalutier Flots-Bleus, 9 marins périssent, dont André Briant et Alphonse Costiou de Trégunc. Ensuite le chalutier Moliva, 8 disparus dont 4 de Trégunc : Yves Gourvellec, Yves Guivarc’h, Francis Philippon et Alexandre Tanguy.
• 1953 : en septembre, le chalutier Soa-Breiz sombre corps et biens en Irlande, 9 marins disparus, dont 4 de Trégunc : Léon Pocher, Émile Herlédan, Pierre Guillou et Arsène Le Guern. Le même jour, le chalutier Vers-l’Horizon coule avec 8 marins de Névez.
• 1957 : en février, le chalutier Ti-Mor de Lorient, 8 péris en mer dont le second à bord : Ollivier Henri de Trégunc.
• 1961 : en février, l’Almajo, en mer d’Irlande, 10 disparus dont 4 de Trégunc, Jean-Marie Briant, Joseph Péron, Ferdinand Le Gall et Robert Sellin.
• 1962 : grosses tempêtes de janvier et d’avril, Le Moros sombre avec 10 marins et Le Matelot avec 15 marins dont Joseph Tocquet de Trégunc.
• 1963 : en janvier, Le Vachic, en mer d’Irlande, 10 disparus dont 7 de Trégunc : Jean Bonder, Roger Guillou, Jean-Paul Furic, Daniel Colin, Jean-Paul Sellin, Pierre Le Naour et Roger Gourronc.
• 1965 : le chalutier Adamastor, fait naufrage avec 9 marins de Moëlan-sur-Mer.
• 1970 : en janvier, le chalutier An-Dorchic avec 3 marins de Trégunc, Georges Ollivier, André Sellin, et Yves Déréat.
• 1972 : au large du Gabon, le thonier Jacques-Christian coule sous une tornade, avec 7 marins dont Robert Tréguier, Yves Guyader et Guy Heurt de Trégunc.
• 1979 : le chalutier Atria, 6 marins périssent dont Pierre-Yves Le Gac, Simon Martin et Albert Dubessy.
• 1983 : le chalutier Cité d’Aleth, fait naufrage en janvier avec 10 membres d’équipage, tous disparus, dont le bosco Paul Cariou de Trégunc. En septembre de la même année, le thonier Reine-des-Berceaux perd ses 6 marins.
• 1987 : le chalutier Gaylord, 5 marins disparus dont Jacques Flatrès de Trégunc, La Jonque coule avec son équipage.
• 2004, le Bugaled-Breizh, coule dans des conditions mystérieuses.
Les accidents de mer
Les marins ne périssent pas toujours suite au naufrage du bateau à cause des tempêtes. Plusieurs pertes de bateaux sont parfois dues à des causes inexpliquées à ce jour, les deux naufrages les plus connus sont La Jonque de Concarneau en mai 1987 et celui du Bugaled-Breizh au Cap Lizard en janvier 2004.
Pour ces deux bateaux, le naufrage ne s’explique pas par des raisons météo, le temps était relativement calme. Le chavirage des bateaux par une force extérieure a été aussi évoqué, des spécialistes ont parlé de sous-marins, accrochés aux câbles du chalut et entraînant le bateau par le fond. En chalutage, un bateau est vulnérable, un important déséquilibre et un câble qui se rompt par exemple, peuvent provoquer le renversement du chalutier. Les patrons-pêcheurs sont très sensibilisés aux croches de leur chalut sur les fonds marins et prêtent une attention particulière lors des manœuvres.
Le 23 octobre 1980, l’épouse d’André Le Guern de Trégunc, patron sur le Freddy-Luc, est sans nouvelle de son mari et du bateau à la vacation du soir de Conquet-radio. Le chalutier est géré en armement artisanal, c’est donc à la femme du patron de déclencher les recherches auprès du CROSS Corsen et de faire les démarches nécessaires auprès des affaires maritimes. Le bateau est perdu corps et biens sur son lieu de pêche, sans doute lors d’une croche. Une association de familles de marins est constituée après ce drame, afin de soutenir dans les épreuves morales et administratives les veuves et leurs familles marquées par la disparition d’un être cher (témoignage de Julienne Le Guern).
Les fortunes de mer
Des marins ont échappé au pire, notamment pendant la tempête du 28 décembre 1947 sur la Pointe de Trévignon. Émile Salomon de Stang Dour, patron du dundee Martyr du Devoir, a essuyé un gros coup de tabac ; il rentre au port avec le tape-cul, le mât, les tangons abattus et la lisse arrachée (récit d’Yves Dizet de Pendruc).
En 1959, une voie d’eau se déclare à bord du Cabellou. Suffoquant à cause des émanations de vapeurs d’huile, le mécanicien, Germain Goalec de Pendruc, continue néanmoins à écoper pour éviter que le moteur ne soit noyé. Le 12 mai 1960, le Cabellou finira ses jours dans l’Anse de Saint-Jean à Concarneau pour devenir la boîte de nuit de Louis Le Mouëllic, dit Loulou-la-Bigorne.
Durant l’hiver 1956, après la campagne de thon, Henri Pleuven de Pendruc a 14 ans lorsqu’il embarque comme mousse sur L ’Appel de la mer, un vieux chalutier des années 1930 qui prend l’eau de toutes parts et risque à tout moment de couler. Il faut pomper l’eau et écoper au seau durant le retour au port de Concarneau.
Les rescapés
Les marins travaillant sur le pont peuvent être emportés par un paquet de mer. Il y a aussi quelques accidents liés au travail au chalut à l’arrière du bateau.
Gérard Le Bail, 24 ans, de Lambell, a raconté plusieurs fois le naufrage en mer d’Irlande du chalutier Saphir de Concarneau le 23 novembre 1963, avec 9 hommes à bord. Jérôme Daoudal, le père du mousse, reste coincé dans la passerelle, ne pouvant ni se dégager par lui-même ni être dégagé, coule avec le bateau, sous les yeux de son fils. Les autres marins ont pu mettre les embarcations de survie à l’eau, dans une mer déchaînée ; ballottés par les vagues, transis de froid, ils seront sauvés in extremis par le chalutier Virginie-Herriot de Concarneau.
Jean Autret de Tachenn-Pontic, patron du chalutier Penfret, et son équipage ont eu très peur, le 1er décembre 1957, au large de l’Irlande, de ne plus revoir leur famille de Trégunc. Heureusement, il y avait dans les parages le chalutier Marie-Anne puis un patrouilleur de la Marine nationale et un avion Lancaster de la base de Lann-Bihoué qui a survolé la zone. La survie de l’équipage n’a tenu qu’à la présence de ces sauveteurs après une terrible nuit de dérive du bateau en perdition dans la tempête.
Lors de la tempête de mi-décembre 1951, les affaires maritimes de Concarneau sont sans nouvelles de deux chalutiers : le Vers-le-Devoir de Gaston Dervout et le Marie-José d’Yvon Bourhis, tous deux de Trégunc. Les épouses sont très inquiètes, la femme d’Yvon s’est déjà habillée en noir, pas de nouvelles par Radio-Conquet, pas de témoins, les recherches se poursuivent pendant quinze jours. Le dicton est pour une fois vérifié : pas de nouvelles, bonnes nouvelles ; les équipages rentrent meurtris mais sauvés par un autre bateau. Le Marie-José a fait un tour complet, moteur endommagé et radio en panne, ce qui explique le silence (témoignages de Madeleine Hélias et Gabrielle Jamin).

Les films sur les marins de Concarneau
Plusieurs films ont relaté la dure vie de marins. Les plus connus ont été tournés dans la région :
• 1955 : Si tous les gars du monde de Christian Jaque, tourné à bord du Lutèce de Concarneau, relate la solidarité des marins à travers le monde.
• 1958 : Pêcheurs d’Islande de Pierre Schoendoerffer, à bord du chalutier Kerantez de Lorient, tourné à Concarneau et sa région, il relate la vie romancée d’un marin incarné par l’acteur Jean-Claude Pascal.
• 1970 : le feuilleton de télévision Les cousins de la Constance de Paul Guimard, réalisé par Robert Mazoyer, en hommage aux 9 disparus en mer d’Irlande du Mary-Brigitte en février 1959, dont le jeune mousse de 16 ans, Ernest Gourlaouen, de Trévignon (témoignage d’Édith Guinguéno dans le Ma Bro de juin 2016).
Pendant la période allant de 1900 à 1982, 552 marins du quartier maritime de Concarneau (de Moëlan-sur-Mer à Fouesnant) sont recensés morts ou disparus en mer ; plus de 50 % de ceux-ci sont de Trégunc.

Les marins de Trégunc subissent de lourdes pertes puisque 294 d’entre eux périssent en mer sur une période de 105 ans de 1882 à 1987. La moyenne d’âge de ces marins décédés est de 32 ans.
Les périodes les plus dramatiques sont celles de 1930 à 1964. De 1930 à 1946, de nombreux dundees à voiles ont coulé, submergés par l’arrière, en faisant plusieurs victimes, mais les chalutiers motorisés des années 1950 à 1987 ont également eu de gros problèmes à cause des tempêtes

De 1901 à 1913, c’est une période creuse pour la pêche, due à la crise de la sardine, il y a eu très peu de naufrages. Les graphiques ci-dessus, montrent le nombre de naufrages en fonction des mois et des années.
Sources
– Le registre des décès de la mairie de Trégunc, et des Affaires maritimes de Concarneau.
– Les archives départementales de Quimper, nationales de Pierrefitte-sur-Seine, de l’Enim de Paimpol.
– Le Service historique de la défense de Lorient et de Vincennes
– Les articles de journaux : Le Finistère, l’Union, Le Télégramme, Ouest-France)
