Joe Lilly, aviateur américain de la seconde guerre mondiale

Le 25 avril 1944, l’aviateur américain Joseph A (Joe) Lilly de la 355e escadrille de combat décolle de la base de Lashenden en Angleterre à bord d’un P Mustang. Seul à bord de son avion de chasse, iI fait partie de l’escadron qui escorte des bombardiers au-dessus de Brunswick en Allemagne. Lors de son retour de mission, le pilote se perd et l’avion américain est touché au-dessus de Lorient. Joe Lilly se trouve au-dessus de Trégunc quand il se décide à sauter en parachute.
Le 25 avril vers 14 heures, le pilote touche le sol à proximité de Beg Postillon. Les gens du village de Keramborgne voient l’avion s’écraser dans un champ tout proche. À son retour en Angleterre, le 13 juillet 1944, Joe Lilly rend compte de sa mission. Voici une traduction de son rapport.
Perdus
Nous nous sommes perdus lors du retour d’une mission d’escorte. Croyant survoler l’Angleterre et nous apprêtant à atterrir quand nous nous aperçûmes que le terrain avait été bombardé et que des chasseurs allemands s’y trouvaient. Les Allemands ouvrirent le feu sur nous mais nous réussîmes à leur échapper.
Parachuté
Plus tard, je fus touché par la DCA au-dessus de Lorient. Lorsque j’actionnai le dispositif de sûreté d’ouverture du cockpit, celui-ci ne fonctionna pas et je dus le briser à coups de poing. Je plongeai, cherchant à atteindre le bord de l’aile gauche, me heurtant la tête sur le bord du cockpit et je sautai pour une chute libre de 600 m avant d’ouvrir mon parachute. Je vis deux personnes en voiture sur une route et je fis glisser mon parachute vers un bois pour les éviter. J’atterris à proximité du bois, me foulant une cheville.
Une quinzaine de personnes coururent vers moi. Je leur montrai mon parachute, essayant de leur parler en français, sans réussir à me faire comprendre.
Secouru et caché
Je courus un kilomètre environ avant de réaliser que je ne pourrais pas aller beaucoup plus loin et je me cachai dans des buissons épineux.
Un Français arriva, me donna de vigoureuses poignées de main tout en me tapant dans le dos. Il n’arrêtait pas de dire “Les Boches, les Boches !” Puis il enleva son manteau et son béret, m’invitant à les mettre. Il me donna sa montre et me dit qu’il m’apporterait de quoi manger un peu plus tard. Je restais couché dans ma cachette pleine d’eau et de boue de 14 h 30 à 21 heures lorsque mon ami réapparut.
Recherches allemandes
Pendant tout ce temps, j’entendis les Allemands qui me recherchaient. Un moment, je vis les bottes d’un soldat allemand à seulement trois mètres de moi. Je pris un cachet de benzédrine pour rester éveillé et ça marcha. Le même soir, mon ami français m’apporta d’autres vêtements et de la nourriture. Il m’annonça que deux cents soldats allemands étaient à ma recherche. Je pouvais à peine marcher et je fus transporté à bicyclette dans une grange située à peine à cent mètres de l’endroit où mon avion s’était crashé. Quelques sentinelles allemandes étaient en poste près de l’appareil.
Tôt le lendemain matin, je fus transféré dans une ferme. Averti de l’arrivée des Allemands, je fus conduit dans une autre maison. Plus tard, j’appris que les Allemands avaient fouillé la première maison peu de temps après mon départ.

Préparation de retour
A bicyclette, je traversai deux agglomérations où l’on prépara mon voyage retour.
Groupe de la Résistance française
Je me trouvais dans un petit camp de la Résistance lorsque la nouvelle du débarquement en Normandie nous parvint. Les Résistants en provenance de toute la section se réunirent dans les bois. Le groupe dans lequel je me trouvais était peu armé avec quelque chose comme douze armes à feu pour cent combattants. Nous les accompagnâmes à deux reprises, munis de leur brassard pendant qu’ils sectionnaient les lignes téléphoniques.
Leur efficacité en ce domaine était telle que les Allemands se résolurent à poster des Français tous les cent mètres le long des lignes, les menaçant d’exécuter des otages à chaque fois que les lignes seraient cisaillées.

Attaque des Allemands
Quelques jours plus tard, un dimanche matin, une Française fit irruption dans notre camp en criant que les Boches, la Gestapo, arrivaient. J’éteignis le feu à l’aide de mes pieds et me mis en route après avoir passé le message aux autres dans la section.
Peu après notre départ, les Allemands ouvrirent le feu sur nous avec leur mitrailleuse distante de trois cents mètres environ. Nous nous cachâmes dans les champs pendant un certain temps. Plus tard, nous arrivâmes dans une grange. C’est là que nous avons appris que les Boches avaient capturé certains de nos hommes. Deux de nos hommes, âgés d’environ 21 et 24 ans, furent frappés à la tête à coups de pied avant d’être fusillés.
Après avoir brûlé notre tente et tout cassé, les Allemands donnèrent des ordres aux gens de la ferme de façon à empêcher les Résistants ou la famille de leur faire des obsèques décentes.
NB : Ce nouveau chapitre de nos aventures au sein des groupes de la Résistance est suffisamment horrible pour dissiper toute illusion sur le traitement que les Allemands réservent à leurs ennemis.
Remerciements à Charles Leroux pour la traduction du rapport de Joe Lilly.

Pour en savoir plus

Un essai pour faire la lumière sur une réalité méconnue.
Bernard Sellin, professeur émérite d’études anglophones à l’Université de Nantes est né à Trégunc; et c’est tout naturellement qu’il est sollicité par les Amis du Patrimoine de Trégunc pour traduire les déclarations des pilotes
Sur ce blog : Il faut sauver le Lieutenant Hawkins